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La filière de l’apprentissage, déjà secouée par les incertitudes budgétaires, voit monter une nouvelle vague d’inquiétude après la publication d’un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas). Ce document met en lumière des dysfonctionnements dans la gestion des contrats par les opérateurs de compétences (Opco) et propose une réforme qui pourrait bouleverser l’organisation actuelle. Alors que le ministère du Travail cherche à réduire les dépenses publiques consacrées à l’apprentissage, ce rapport arrive à un moment particulièrement sensible pour la filière.
Contents
- 1 Une filière en pleine croissance mais fragilisée
- 2 Un rapport qui critique l’efficacité des Opco
- 3 Vers un transfert de compétences à l’Agence de services et de paiements (ASP) ?
- 4 Une vision différente du côté du ministère du Travail
- 5 Un secteur sous tension malgré les succès de l’apprentissage
- 6 Des décisions à venir qui pourraient redessiner le paysage
Une filière en pleine croissance mais fragilisée
L’apprentissage s’est imposé comme l’un des leviers majeurs de la politique de l’emploi et de l’insertion des jeunes en France. Les chiffres témoignent d’une progression spectaculaire : de 320 000 contrats signés en 2018, on est passé à près de 900 000 en 2024. Une hausse de grande ampleur, saluée pour son impact sur l’accès à l’emploi et sur la montée en compétences des jeunes.
Cette croissance rapide a toutefois mis sous pression le système administratif chargé de gérer les contrats. Les Opco, créés en 2018 par la loi Pénicaud, occupent une place centrale dans ce dispositif. Pourtant, leur efficacité fait aujourd’hui débat, au point que certains experts et responsables politiques envisagent de revoir complètement leur rôle.
Un rapport qui critique l’efficacité des Opco
Commandé en mars par l’ex-ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet, le rapport de l’Igas dresse un constat préoccupant. Il évalue le fonctionnement des onze Opco, chacun chargé d’accompagner les branches professionnelles selon de grands secteurs d’activité. Leur mission principale consiste notamment à financer les formations, accompagner les entreprises et assurer la gestion administrative des contrats d’apprentissage.
Or, selon l’Igas, ces organismes n’atteignent pas le niveau d’efficacité attendu. Le rapport pointe des lenteurs, des disparités importantes entre Opco, une complexité administrative persistante et une gestion qui ne permettrait pas d’assurer un suivi suffisamment rigoureux et homogène des contrats sur l’ensemble du territoire.
Les Opco, initialement pensés pour harmoniser et fluidifier le système, se voient reprocher une organisation trop éclatée, une capacité inégale à absorber l’augmentation massive du nombre de contrats, ainsi qu’un manque de coordination globale.
Vers un transfert de compétences à l’Agence de services et de paiements (ASP) ?
Face à ces constats, l’Igas formule une recommandation forte : confier la gestion des contrats d’apprentissage non plus aux Opco, mais à l’Agence de services et de paiements (ASP). Cet organisme public, déjà chargé de verser les aides financières dans plusieurs domaines, possède une expertise reconnue dans la gestion de dispositifs administratifs complexes à grande échelle.
Pour l’Igas, le transfert à l’ASP permettrait :
- Une meilleure standardisation des procédures,
- Un traitement plus rapide et homogène des dossiers,
- Une réduction des coûts de gestion,
- Une vision centralisée, plus adaptée au volume actuel et futur des contrats.
Cette proposition constitue cependant une rupture majeure. Elle remettrait en question l’un des fondements de la loi Pénicaud, qui confiait précisément aux Opco la responsabilité de connecter les besoins des entreprises à la formation et à l’apprentissage.
Une vision différente du côté du ministère du Travail
La prise de position de l’Igas contraste avec celle du ministère du Travail. Ce dernier ne privilégie pas, à ce stade, un transfert à l’ASP. Au contraire, il souhaiterait renforcer les Opco, améliorer leur fonctionnement interne et leur donner les moyens d’assumer plus efficacement leurs missions.
Ce désaccord crée un climat de doute, d’autant plus que les arbitrages budgétaires en cours visent à réduire de 2 à 3 milliards d’euros les dépenses consacrées à l’apprentissage. Une perspective qui inquiète déjà les centres de formation, les entreprises et les apprentis, car elle pourrait se traduire par une diminution des niveaux de prise en charge ou une restriction du nombre de contrats financés.
Dans ce contexte, l’idée d’une réforme structurelle des Opco, potentiellement accompagnée d’un transfert à l’ASP, est perçue comme une nouvelle source d’instabilité.
Un secteur sous tension malgré les succès de l’apprentissage
L’une des grandes forces de l’apprentissage réside dans son efficacité en matière d’insertion professionnelle. Les taux d’emploi à la sortie restent élevés, et les entreprises apprécient de pouvoir former des jeunes en fonction de leurs besoins réels. Pour cette raison, toute réforme est scrutée de près par les acteurs du secteur.

Les Opco, de leur côté, soulignent souvent que la croissance rapide du nombre de contrats les a obligés à absorber un volume de travail inédit, sans toujours disposer des ressources humaines ou financières nécessaires. Ils rappellent également que leurs missions dépassent la simple gestion administrative : accompagnement des entreprises, soutien aux branches professionnelles, construction des référentiels de formation, analyse des besoins en compétences…
La crainte est donc que, en recentrant le dispositif sur l’ASP, on perde la dimension d’ancrage sectoriel qui faisait la spécificité du modèle introduit en 2018.
Des décisions à venir qui pourraient redessiner le paysage
La filière attend désormais les arbitrages du gouvernement. Réductions budgétaires, réorganisation du système de gestion, éventuels transferts de compétences : tout semble encore ouvert. Pour les entreprises, les centres de formation et les jeunes, l’enjeu est crucial. L’apprentissage a démontré son efficacité ; il s’agit maintenant de savoir si le modèle peut continuer à fonctionner dans un contexte de tension financière et de réformes possibles.
Beaucoup appellent à préserver ce qui fait la force du dispositif : sa proximité avec les branches professionnelles, son adaptabilité, et la dynamique positive qu’il a générée ces dernières années. Mais ils demandent aussi plus de clarté, de stabilité et une vision à long terme pour éviter que les incertitudes actuelles ne freinent la dynamique.