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La décision du Premier ministre de suspendre la réforme des retraites de 2023 marque un tournant inédit dans l’histoire sociale récente. Depuis 1993, aucune réforme n’avait été mise entre parenthèses après son adoption. Ce choix politique illustre à quel point le sujet des retraites demeure explosif en France. Il faut dire qu’aucune réforme de ce type n’a jamais suscité l’adhésion populaire. Le report de l’âge de départ ou l’allongement de la durée de cotisation sont systématiquement perçus comme des reculs sociaux, en France comme chez nos voisins européens.
La réforme de 2010, qui avait relevé l’âge légal de départ de 60 à 62 ans, avait déjà donné lieu à des mobilisations massives. Celle de 2023, malgré un contexte démographique et financier plus contraint encore, n’a pas échappé à cette logique de rejet. Sa suspension, annoncée jusqu’à la fin de l’année 2027, ouvre une période d’incertitude majeure.
Dans ce contexte, une question s’impose : quel candidat à l’élection présidentielle osera défendre l’application de cette réforme, alors même que beaucoup promettront son abrogation ? Il est plus probable que certains proposent une refonte globale du système, sous une autre forme, afin de rééquilibrer durablement les régimes de retraite. Reste à savoir sur quelles bases une telle réforme pourrait être construite.
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Redonner un rôle central aux partenaires sociaux
Une première piste consisterait à confier davantage la gouvernance des retraites aux partenaires sociaux, renouant ainsi avec l’esprit fondateur de la Libération. Cette orientation supposerait toutefois de clarifier les responsabilités respectives de l’État et des régimes d’assurance. Depuis plusieurs décennies, une confusion persistante s’est installée entre logique assurantielle et logique de solidarité nationale.
Ainsi, l’assurance vieillesse finance aujourd’hui des dépenses qui ne relèvent pas strictement de droits contributifs, comme certaines majorations familiales. Pour revenir à une architecture plus lisible, il serait nécessaire de réaffirmer le principe d’équilibre financier des régimes assurantiels, le recours à l’endettement devant rester limité aux besoins de trésorerie à court terme. L’exemple de l’Agirc-Arrco démontre que les partenaires sociaux sont capables de piloter efficacement un régime, en adaptant les paramètres lorsque cela est nécessaire pour préserver l’équilibre financier.
Aller vers des régimes par points, sans tout uniformiser
Une seconde option reposerait sur la généralisation de régimes par points. Contrairement au projet de réforme de 2019, l’unification totale de l’ensemble des régimes devrait être écartée. Les expériences étrangères montrent qu’une transition réussie vers des régimes par points passe par le maintien de plusieurs systèmes distincts.
En Allemagne, en Suède ou en Italie, les pouvoirs publics ont choisi de conserver des régimes différenciés tout en harmonisant progressivement leurs règles. En France, une convergence graduelle pourrait conduire à l’émergence de deux ou trois grands régimes par points : un pour les salariés du secteur privé, un pour les agents publics, et un pour les indépendants et les professions libérales. Les régimes complémentaires pourraient, quant à eux, soit être maintenus, soit rapprochés des régimes de base.
Introduire davantage de logique actuarielle
Une troisième piste serait d’intégrer des mécanismes plus actuariels dans le calcul des pensions. Dans ce type de système, le montant de la retraite dépend davantage de l’espérance de vie au moment du départ. Cette approche permet de mieux prendre en compte l’évolution démographique et d’ajuster automatiquement les droits en fonction de la durée moyenne de versement des pensions.
Si ce modèle peut susciter des craintes, il présente l’avantage d’une plus grande transparence et d’une meilleure soutenabilité financière à long terme. Il oblige également à poser clairement la question de l’équilibre entre solidarité et contributivité.
Supprimer l’âge légal au profit d’une retraite plus flexible
La quatrième voie consisterait à remettre en cause le principe même de l’âge légal de départ à la retraite. Dans de nombreux pays, ce concept n’existe pas ou plus. Seul compte un nombre minimum de trimestres ou de points permettant d’ouvrir des droits à pension à taux plein.
Un système de retraite « à la carte » offrirait davantage de souplesse aux assurés, en leur permettant de choisir leur âge de départ en fonction de leur parcours professionnel, de leur état de santé ou de la pénibilité de leur travail. Grâce aux trimestres validés et aux points accumulés, il deviendrait plus aisé de reconnaître les carrières longues ou difficiles, sans recourir à des dispositifs complexes et souvent contestés.

Généraliser l’accès à la capitalisation
Enfin, une cinquième piste serait d’ouvrir largement l’accès à l’épargne retraite par capitalisation. Aujourd’hui, seuls environ 20 % des actifs disposent d’un dispositif de ce type. L’épargne retraite reste essentiellement l’apanage des cadres supérieurs, des salariés des grandes entreprises, des indépendants et des professions libérales.
Pourtant, l’ensemble des actifs devrait pouvoir bénéficier d’un produit collectif d’épargne retraite, conçu sur un modèle simple et accessible, comparable à celui du compte personnel de formation. Une telle évolution permettrait de diversifier les sources de revenus à la retraite et de réduire la pression pesant sur les régimes par répartition.
Sortir durablement du conflit
La France ne peut se permettre de laisser perdurer une « guerre des retraites » qui fragilise la cohésion sociale. Opposer les baby-boomers aux générations suivantes ne constitue pas une solution. Le pays compte aujourd’hui près de 17 millions de retraités ; ils seront environ 23 millions après 2050.
L’enjeu est double : éviter l’asphyxie de l’économie sous le poids croissant des cotisations sociales et prévenir l’appauvrissement des seniors par une érosion continue des pensions. Réconcilier ces impératifs exigera responsabilité, lucidité et maturité collective, afin de construire un système à la fois juste, soutenable et accepté.