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CPF : Vers un Renforcement Qualitatif de l’Action de Formation

La transformation du Compte Personnel de Formation (CPF) prend une nouvelle tournure. Après une phase marquée par la lutte contre la fraude et une réglementation intensifiée, la Caisse des Dépôts (CDC) inaugure une nouvelle étape axée sur l’évaluation de la qualité pédagogique. À travers un référentiel structuré de 17 critères, pas moins de 1 000 audits seront menés en 2025. Une opération qui questionne le positionnement futur des organismes de formation face à ce tournant stratégique.

Un tournant vers une qualité objectivée

Longtemps évoqué mais rarement mis en œuvre de manière opérationnelle, le contrôle qualité de la formation entre dans une phase concrète. La CDC, bras opérationnel du CPF en lien avec le ministère du Travail, vient d’annoncer sur la plateforme EDOF une campagne d’audits à grande échelle. Dès mars 2025, les premières inspections auront lieu, avec pour objectif affiché : instaurer une culture de l’amélioration continue, centrée sur la qualité réelle de l’action de formation et non plus uniquement sur sa conformité administrative.

Gwenola Martin-Gonzalez, directrice de la formation professionnelle à la CDC, précise : « Cette démarche s’inscrit dans une dynamique constructive. Il ne s’agit pas de punir, mais d’évaluer avec l’ambition d’élever collectivement le niveau de qualité des formations proposées via le CPF ».

Un passé marqué par une régulation brutale

Pour comprendre ce nouveau virage, il faut revenir sur le contexte des premières années du CPF. Dès 2020, une explosion des fraudes a contraint les pouvoirs publics à durcir drastiquement le cadre réglementaire. Entre 2021 et 2022, le secteur a subi une véritable purge : le nombre d’organismes de formation est passé de 25 000 à environ 15 000. Un choc brutal pour la filière, encore marqué par les effets de cette période de régulation intensive.

Si la certification Qualiopi instaurée en 2018 a permis d’uniformiser les pratiques organisationnelles et de garantir certains standards, elle ne s’attaquait pas au cœur de la question : la qualité effective des formations dispensées. C’est précisément ce que la nouvelle démarche entend évaluer.

Un nouveau cadre d’audit fondé sur 17 critères

Afin d’éviter les écueils du passé, la CDC a pris le temps de bâtir un dispositif structuré. Une phase d’expérimentation s’est déroulée entre 2023 et 2024 auprès d’une quinzaine d’organismes volontaires. Ces tests ont permis d’affiner la méthodologie d’évaluation et de définir les trois grandes thématiques qui encadrent les audits :

  1. La réalisation effective de l’action de formation : conditions matérielles, respect du programme, modalités pédagogiques.
  2. L’impact pédagogique et professionnel : acquisition de compétences, obtention d’une certification, lien avec un projet professionnel.
  3. La relation avec les tiers : qualité des liens avec les sous-traitants, clarté des responsabilités, traçabilité des interventions.

Ces axes sont déclinés en 17 critères concrets, allant de la composition des groupes de stagiaires à la pertinence du rythme de formation, en passant par l’évaluation des acquis et la capacité à répondre aux besoins des publics cibles.

Une méthodologie progressive et structurée

Les audits seront menés soit sur pièces, soit sur site selon les cas. Leur mise en œuvre a été confiée à un groupement de prestataires associant Sauléa et Ernst & Young, mobilisant consultants et experts de l’audit. Le choix de partenaires aguerris illustre la volonté de la CDC de professionnaliser et d’objectiver cette nouvelle phase de contrôle.

Le message est clair : il ne s’agit plus seulement de vérifier si les organismes disposent d’un process, mais d’évaluer la valeur ajoutée réelle de la formation pour le bénéficiaire. Un changement de paradigme qui appelle les acteurs de la formation à se repositionner, tant sur le fond que sur la forme.

Des recommandations, mais aussi des obligations

Officiellement, la démarche se veut avant tout pédagogique. La CDC insiste sur le caractère progressif et non punitif de cette nouvelle vague de contrôle. « Nous ne cherchons pas à sanctionner les organismes, mais à leur fournir des recommandations pour progresser », indique l’opérateur public. Toutefois, en cas de non-conformité avérée avec le cadre légal, des suites pourront être engagées. Cela pourra aller de la mise en demeure à une procédure contradictoire dans les cas les plus graves.

Pour anticiper ces situations, un outil d’auto-évaluation sera bientôt mis à disposition des organismes. Il leur permettra de tester leur conformité par rapport aux nouveaux critères et de corriger le tir avant un éventuel audit officiel.

Une démarche concertée avec les acteurs du secteur

Consciente de la sensibilité du sujet, la CDC a pris soin de dialoguer avec les grandes fédérations du secteur. En février, la grille et la méthodologie ont été partagées avec les principales têtes de réseaux afin de recueillir leurs avis et d’ajuster certains points du dispositif. L’enjeu est d’éviter un effet de panique comme celui observé lors de la mise en œuvre de Qualiopi ou du filtrage massif des offres sur EDOF.

Les premiers retours semblent globalement positifs, à condition que la démarche reste transparente, progressive et ouverte aux ajustements. La CDC s’est engagée à prendre en compte les leçons tirées des premières séries d’audits pour faire évoluer le référentiel si nécessaire.

Vers une régulation plus mature et ciblée

Cette initiative s’inscrit dans une tendance de fond : celle d’une régulation plus qualitative, plus fine, et plus responsable. Après la phase de « nettoyage » anti-fraude, les pouvoirs publics veulent désormais miser sur l’excellence pédagogique et l’utilité sociale des formations. Le CPF devient ainsi un levier de transformation positive, à condition que les règles du jeu soient claires et équitables pour tous.

Dans un contexte budgétaire tendu, cette montée en exigence vise également à garantir que les fonds publics sont utilisés à bon escient. On s’oriente vers une logique de performance mesurable : chaque euro investi devra démontrer son impact en termes de montée en compétences et de retour à l’emploi.

Une nouvelle ère pour les organismes de formation

Face à cette évolution, les organismes de formation devront adapter leur stratégie. Il ne suffit plus de proposer un catalogue riche ou un site attrayant. Il s’agit désormais de prouver la valeur pédagogique de chaque action, de documenter l’évolution des apprenants, et d’aligner les formations sur des projets professionnels concrets.

Ce changement peut paraître contraignant, mais il ouvre aussi des opportunités : se différencier par la qualité, renforcer la crédibilité de son offre, et tisser des partenariats plus solides avec les financeurs.

Conclusion : une qualité enfin au cœur du CPF ?

Ce nouveau dispositif d’audit porté par la CDC marque une inflexion notable dans la politique de régulation du CPF. Il ne s’agit plus seulement de lutter contre les abus, mais de construire un système où la qualité pédagogique devient un critère central de financement. Pour les organismes de formation, c’est un appel à l’exigence, mais aussi une chance de valoriser leur expertise.

Alors, ce virage qualitatif du CPF sera-t-il durable ? Tout dépendra de la capacité des acteurs publics et privés à avancer ensemble vers un modèle plus transparent, plus pertinent et plus performant. La formation professionnelle entre dans une nouvelle ère, où la rigueur ne sera plus un frein, mais un facteur de confiance et de progrès.

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