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Depuis l’adoption de la loi « Avenir professionnel » en 2018, les acteurs du secteur de la formation professionnelle attendaient la concrétisation d’un pan essentiel du dispositif : le contrôle économique et financier de l’État sur les associations Transitions Pro (ATPro). Plus de cinq ans après, ce contrôle va enfin voir le jour. Le ministère du Travail a annoncé que le Commissariat général à l’économie et aux finances (Cgefi) exercera désormais cette mission stratégique. Décryptage d’un tournant majeur pour le pilotage des transitions professionnelles.
Contents
- 1 Une obligation inscrite dans la loi depuis 2018, restée longtemps en suspens
- 2 Le rôle stratégique du Cgefi
- 3 Pourquoi ce changement maintenant ?
- 4 Un enjeu de transparence et de performance
- 5 ATPro : un acteur central dans les transitions professionnelles
- 6 Une harmonisation avec le contrôle des autres acteurs de la formation
- 7 Quels impacts pour les associations Transitions Pro ?
- 8 Un pas de plus vers un pilotage centralisé de la formation professionnelle
- 9 Une vigilance qui s’impose dans un contexte budgétaire tendu
- 10 Conclusion : vers plus de transparence et d’efficacité
Une obligation inscrite dans la loi depuis 2018, restée longtemps en suspens
La loi « Avenir professionnel » du 5 septembre 2018 a profondément remanié l’écosystème de la formation professionnelle et de l’accompagnement des parcours. Parmi les nombreuses réformes introduites, l’une prévoyait explicitement un contrôle économique et financier de l’État sur les ATPro, ces associations chargées de gérer les projets de transition professionnelle, les anciens dispositifs CIF (congés individuels de formation), et plus largement les financements liés à la reconversion des salariés.
Pourtant, malgré cette inscription claire dans le texte législatif, ce contrôle n’avait jamais été mis en œuvre. Les ATPro fonctionnaient jusqu’ici dans un cadre autonome, avec des remontées régulières à France Compétences, mais sans l’intervention directe d’un organisme de contrôle étatique.
Le rôle stratégique du Cgefi
C’est donc au Commissariat général à l’économie et aux finances (Cgefi), structure relevant du ministère de l’Économie, que revient désormais cette responsabilité. Le Cgefi est déjà chargé du contrôle économique et financier sur d’autres acteurs du champ public, notamment certains établissements publics, agences ou opérateurs d’État.
Son rôle consiste à garantir que les fonds publics sont utilisés de manière optimale, efficace, et conforme aux missions d’intérêt général. Dans le cadre des ATPro, cela signifie vérifier la bonne gestion des enveloppes dédiées à la reconversion professionnelle, la pertinence des dépenses, la transparence des procédures, et la conformité avec les orientations fixées par France Compétences et l’État.
Pourquoi ce changement maintenant ?
Plusieurs raisons expliquent cette activation tardive du dispositif de contrôle.
Tout d’abord, la période 2019–2023 a été marquée par une montée en charge progressive du nouveau système. Il s’agissait de laisser aux ATPro le temps de prendre en main leur rôle dans un paysage en pleine recomposition : disparition du Fongecif, montée du CPF de transition, déploiement de France Compétences, réforme des Opco, etc.
Ensuite, la crise sanitaire de 2020 a bouleversé les priorités budgétaires et opérationnelles. Le temps administratif n’a pas toujours suivi le rythme des ambitions politiques. Mais aujourd’hui, avec un système stabilisé et des enjeux budgétaires de plus en plus pressants, l’État souhaite renforcer sa maîtrise des dépenses publiques affectées à la formation professionnelle.
Un enjeu de transparence et de performance
Le contrôle du Cgefi vise aussi à renforcer la transparence des décisions prises par les ATPro, notamment en matière de sélection des dossiers, de critères d’éligibilité, et de traçabilité des financements.
Chaque année, des milliers de salariés sollicitent un financement pour un projet de reconversion. La qualité de l’instruction, l’équité dans le traitement des candidatures et l’adéquation des projets financés avec les priorités économiques nationales deviennent des enjeux clés.
Le rôle du Cgefi consistera aussi à analyser si les fonds attribués produisent un retour sur investissement réel en matière de retour à l’emploi, d’insertion professionnelle ou d’évolution de carrière. Cela s’inscrit dans une logique de pilotage par la performance, déjà renforcée par les indicateurs de France Compétences.
ATPro : un acteur central dans les transitions professionnelles
Les associations Transitions Pro jouent un rôle pivot dans l’accompagnement des salariés souhaitant changer de métier ou se réorienter. Présentes dans chaque région, elles examinent les demandes de financement de projets de transition professionnelle (PTP), accompagnent les candidats dans la construction de leur dossier, évaluent la pertinence des projets, et assurent le lien avec les organismes de formation.

Elles gèrent également des dispositifs comme le CPF de transition, et participent à la mise en œuvre des parcours certifiants et professionnalisants. Leur impact est donc concret pour des milliers de bénéficiaires chaque année.
Ce positionnement justifie pleinement une vigilance accrue de l’État, au même titre que pour les Opco, désormais soumis à un encadrement financier rigoureux.
Une harmonisation avec le contrôle des autres acteurs de la formation
Avec l’entrée du Cgefi dans le champ de contrôle des ATPro, l’écosystème de la formation professionnelle devient plus homogène en matière de régulation.
Les Opco sont déjà placés sous la double tutelle de l’État et de France Compétences. Les CFA (centres de formation d’apprentis) doivent être certifiés Qualiopi et répondre à des exigences de conformité strictes. Les organismes de formation sont également soumis à des audits réguliers.
Dans ce contexte, il devenait difficilement justifiable de maintenir les ATPro à l’écart d’un dispositif de contrôle pourtant prévu par la loi. Leur intégration dans le périmètre du Cgefi permet de boucler la chaîne de régulation et d’assurer une cohérence globale du pilotage.
Quels impacts pour les associations Transitions Pro ?
Pour les ATPro, cette nouvelle donne implique un renforcement de leurs obligations en matière de gestion et de reddition de comptes. Elles devront se doter de procédures internes rigoureuses pour répondre aux exigences du Cgefi : traçabilité des décisions, justification des dépenses, reporting détaillé, conformité administrative et financière.
Cela pourrait aussi se traduire par des audits réguliers, des recommandations à mettre en œuvre, voire des ajustements dans leur mode de fonctionnement. En contrepartie, cela peut renforcer leur crédibilité institutionnelle et légitimer davantage leurs actions auprès des partenaires (entreprises, salariés, organismes de formation, autorités publiques…).
Un pas de plus vers un pilotage centralisé de la formation professionnelle
La désignation du Cgefi pour contrôler les ATPro s’inscrit dans un mouvement plus large de centralisation du pilotage des politiques de formation. Depuis la création de France Compétences, la volonté de l’État est claire : rationaliser les dispositifs, mieux répartir les budgets, et orienter les financements vers les priorités économiques et sociales (métiers en tension, reconversions stratégiques, transitions écologiques et numériques…).
Dans ce cadre, le contrôle financier devient un levier de gouvernance à part entière. Il permet d’aligner les actions de terrain avec les grandes orientations politiques et d’éviter les dérives, erreurs ou gaspillages qui peuvent nuire à l’efficacité du système.
Une vigilance qui s’impose dans un contexte budgétaire tendu
Le contexte financier actuel justifie pleinement ce regain de vigilance. Le budget de la formation professionnelle reste sous tension, entre la montée des demandes, les besoins croissants en reconversion, et les limites de financement de France Compétences.
En 2024, plusieurs rapports ont alerté sur la soutenabilité financière du système, notamment en ce qui concerne le CPF et l’alternance. Dans cette perspective, l’État souhaite mieux contrôler où vont les fonds et s’assurer qu’ils servent des projets véritablement porteurs pour l’économie et les individus.
Conclusion : vers plus de transparence et d’efficacité
Avec le Cgefi désormais aux commandes du contrôle économique et financier des ATPro, l’écosystème de la formation professionnelle gagne en transparence et en cohérence. Ce changement, longtemps attendu, permet de finaliser l’architecture de régulation imaginée dès 2018.
Il s’agit d’un pas important pour sécuriser l’usage des deniers publics, renforcer la qualité des services offerts aux salariés, et s’assurer que chaque euro investi dans les transitions professionnelles contribue efficacement à la montée en compétences de la population active.