Recent Posts
- August, 2025
CPF : D’un droit individuel à une stratégie collective – Le tournant décisif du décret du 14 avril 2025
Maîtrise de la réglementation des licences IV : un levier stratégique pour la revitalisation des zones rurales
Rapport d’activité 2024 de la DGEFP : Renforcer l’emploi et la formation professionnelle en France
La formation des élus locaux : un dispositif à deux volets
Passeport de prévention : tout savoir sur les nouvelles modalités de déclaration des formations
CPF : D’un droit individuel à une stratégie collective – Le tournant décisif du décret du 14 avril 2025

Le Compte personnel de formation (CPF), créé en 2015, a profondément transformé l’accès à la formation professionnelle en France. Conçu comme un droit individuel, autonome et portable, il a permis à des millions de salariés d’accéder à des formations variées, selon leurs besoins ou projets personnels. Mais dix ans plus tard, une évolution majeure est en marche : la transformation du CPF en un outil co-construit, impliquant activement les entreprises. Le décret du 14 avril 2025, signé par François Bayrou et porté par la ministre du Travail Astrid Panosyan-Bouvet, formalise ce changement de paradigme sans créer de nouveaux droits, mais en structurant mieux les modalités d’abondement par les employeurs et les financeurs.
Ce tournant marque la consolidation d’un CPF plus stratégique, partagé, et aligné sur les enjeux économiques collectifs, sans perdre sa vocation initiale de développement individuel.
Contents
- 1 Un dispositif initialement individuel, mais aux limites bien réelles
- 2 Un CPF co-construit : réponse pragmatique aux enjeux contemporains
- 3 Un modèle déjà en action : le retour d’expérience du terrain
- 4 Le rôle central des organismes de formation dans la transformation
- 5 Vers un CPF outil de résilience et d’innovation sociale
- 6 Conclusion : vers une nouvelle culture de la formation professionnelle
Un dispositif initialement individuel, mais aux limites bien réelles
Depuis sa mise en place, le CPF a été un outil d’autonomie pour les actifs, leur permettant de choisir librement des formations parmi un catalogue en ligne. Cependant, cette promesse d’indépendance a révélé plusieurs failles : difficulté à s’orienter dans une offre massive et inégale en qualité, faible lisibilité des résultats attendus, manque d’accompagnement personnalisé… Nombre d’usagers, bien que motivés, se retrouvaient démunis face à des choix complexes.
Surtout, penser que chaque salarié peut définir seul son besoin en compétences est une vision qui ignore la réalité du terrain. C’est souvent l’entreprise, grâce à sa connaissance des besoins opérationnels et stratégiques, qui est la mieux placée pour identifier les compétences clés à développer. Les directions RH, notamment, disposent de l’expertise nécessaire pour construire des parcours cohérents, alignés sur les métiers, et pour garantir un investissement efficace.
Un CPF co-construit : réponse pragmatique aux enjeux contemporains
Le décret du 14 avril s’inscrit dans un contexte économique tendu, marqué par la nécessité pour les entreprises de renforcer leur compétitivité, tout en s’adaptant à des transitions multiples : numérique, écologique, technologique. Dans ce cadre, le CPF devient un outil collectif au service d’un objectif partagé : faire monter en compétences les salariés pour accompagner la transformation des organisations.
Cette nouvelle approche du CPF repose sur un principe simple mais puissant : l’implication conjointe des entreprises et des salariés dans la définition, le financement et le suivi des formations. Ce modèle permet de sortir du schéma individuel, pour construire des trajectoires apprenantes alignées avec les besoins des deux parties.
L’intérêt est double :
- Optimiser les ressources financières en mutualisant les efforts (abondement partagé, suppression du ticket modérateur pour le salarié) ;
- Améliorer l’efficacité des formations grâce à une meilleure orientation et à un engagement renforcé.
Un modèle déjà en action : le retour d’expérience du terrain
Chez Lingueo, entreprise spécialisée dans la formation linguistique et pionnière du CPF co-construit, les résultats sont probants. Alors que le CPF autonome enregistre un taux moyen de complétion autour de 80%, les dispositifs co-construits dépassent souvent 96% d’achèvement. Ce chiffre illustre à quel point l’implication des entreprises dans la sélection, le financement et le suivi des formations améliore l’engagement des apprenants.

Cette dynamique repose sur un prérequis essentiel : l’adhésion volontaire du salarié, qui reste l’unique titulaire de son compte. Il ne s’agit donc pas d’imposer, mais de convaincre. Pour cela, les entreprises doivent déployer une politique de formation claire et bien communiquée, faisant comprendre aux salariés que cette co-construction est un levier gagnant-gagnant.
Le rôle central des organismes de formation dans la transformation
Les prestataires de formation ne sont pas en reste. Leur rôle évolue également : il ne s’agit plus simplement de proposer des contenus, mais d’accompagner les entreprises dans la définition de parcours sur mesure, en lien avec leurs besoins métiers. Cela suppose une approche plus consultative, plus stratégique, et une capacité à valoriser intelligemment les budgets disponibles (CPF, OPCO, plan de développement des compétences…).
Les retours d’expérience montrent que les PME et ETI bénéficient particulièrement de cet accompagnement. Grâce à des plateformes RH dédiées, une meilleure visibilité sur les droits formation, et un pilotage affiné des compétences, elles parviennent à réduire leur reste à charge tout en construisant des dispositifs de qualité.
En encadrant mieux les modalités de co-abondement, le décret du 14 avril ne fait pas qu’ajuster un dispositif technique : il formalise une vision nouvelle du développement des compétences, fondée sur le partenariat, la stratégie et la confiance. Ce modèle ouvre la voie à une formation continue plus intelligente, plus collective, capable d’accompagner les grandes transitions économiques de notre époque.
La co-construction CPF devient ainsi un outil de résilience, permettant aux entreprises de mieux anticiper les besoins, aux salariés de monter en compétences dans des conditions favorables, et à la société d’investir plus efficacement dans l’humain.
Conclusion : vers une nouvelle culture de la formation professionnelle
Le CPF ne disparaît pas en tant que droit individuel, mais il change de nature. Il devient, grâce à ce nouveau cadre réglementaire, un levier stratégique partagé, au croisement des besoins individuels et collectifs. Ce changement nécessite une mobilisation de tous les acteurs : employeurs, salariés, RH, organismes de formation.
Dans un contexte où l’adaptabilité et l’apprentissage permanent deviennent les clés de la compétitivité, faire évoluer le CPF vers un modèle co-construit n’est pas seulement pertinent, c’est indispensable.
Il appartient désormais aux entreprises et aux professionnels de la formation de saisir cette opportunité, d’en faire un levier de performance et d’épanouissement pour bâtir ensemble les compétences de demain.