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Entretien avec Cécile Bertrand : éclairages sur l’avenir du CPF et la place des cofinanceurs

À l’occasion de l’événement CPF coconstruit, organisé par la Caisse des Dépôts fin juin 2025, nous avons eu l’opportunité d’interviewer Cécile Bertrand, cheffe du pôle CPF à la DGEFP (Délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle). Cet échange, toujours d’actualité, permet de mieux comprendre les évolutions récentes du Compte Personnel de Formation, le rôle croissant des employeurs et des cofinanceurs, ainsi que les ambitions de la DGEFP pour les années à venir.

Le rôle de Cécile Bertrand à la DGEFP

En poste depuis septembre 2022, Cécile Bertrand dirige le pôle CPF au sein de la DGEFP. Ses missions couvrent plusieurs volets stratégiques :

  • la gestion du Compte Personnel de Formation (CPF) et des dispositifs associés, comme le SI-CPF, le data-hub AGORA, le passeport de compétences ou encore le passeport de prévention, dont la gestion opérationnelle est confiée à la Caisse des Dépôts ;
  • la coordination avec les autres compteurs de droits individuels : le compte professionnel de prévention (C2P) et le compte d’engagement citoyen (CEC) ;
  • la représentation de la DGEFP et du ministère auprès des institutions européennes et internationales.

Un rôle clé, donc, qui fait du pôle CPF un véritable levier dans la politique de formation tout au long de la vie.

L’évolution du CPF : simplification et sécurisation des abondements

Le 14 avril 2025, une réforme importante a marqué un tournant pour le CPF. Elle a introduit des ajustements en matière de fléchage et de cofinancement, avec comme objectif de renforcer la participation des financeurs tiers (employeurs, branches, OPCO, opérateurs publics).

La nouveauté majeure réside dans l’institutionnalisation de la plateforme EDEF (Espace des Employeurs et des Financeurs) dans le code du travail. Cet outil permet désormais aux financeurs de fixer les conditions d’attribution des dotations supplémentaires et, le cas échéant, d’en prévoir le remboursement en cas de non-utilisation. Concrètement, EDEF simplifie la relation employeur-salarié : l’accord financier est matérialisé, suivi et sécurisé via la plateforme.

Ainsi, l’équilibre entre liberté d’utilisation du CPF par le titulaire et conditions posées par les financeurs tiers est mieux défini. L’objectif est clair : favoriser la responsabilisation, éviter les abus et garantir que les financements soient utilisés pour des certifications ou des parcours de qualité.

La co-construction : une nouvelle étape pour les entreprises

Le CPF est né grâce à un accord des partenaires sociaux, qui ont souhaité créer un droit individuel et autonome à la formation. Mais depuis quelques années, l’État encourage une co-construction entre salariés et employeurs.

Depuis la loi de finances 2023, une participation financière obligatoire a été instaurée pour le salarié, sauf lorsque son employeur ou son OPCO cofinance la formation. Dans ce contexte, la réforme du 14 avril et les nouvelles fonctionnalités d’EDEF renforcent la logique de dialogue.

Il ne s’agit pas de restreindre la liberté de choix des salariés, mais d’inciter à un consensus entre l’entreprise et le collaborateur. En anticipant les besoins en compétences, l’entreprise peut orienter les financements vers des formations stratégiques, tout en tenant compte des aspirations du salarié, qu’il souhaite évoluer dans son poste ou changer de métier.

Des leviers techniques pour impliquer tous les financeurs

Afin de faciliter la participation des différents acteurs, la plateforme EDEF a été pensée comme un outil centralisé et accessible. Chaque financeur (entreprise, branche, OPCO, opérateur public) dispose d’un profil dédié, permettant de gérer directement ses dotations et conditions.

Pour les employeurs, l’accès est simplifié grâce à une interconnexion avec net-entreprises, déjà utilisé pour les déclarations sociales. Un portail public a également été mis en place afin de diffuser la réglementation et les actualités liées au CPF coconstruit : financeurs.moncompteformation.gouv.fr/espace-public.

Ces outils techniques traduisent une volonté de fluidifier les démarches, de réduire la complexité administrative et d’encourager la mobilisation des financements complémentaires.

Suivre l’impact de la réforme : quels indicateurs ?

La DGEFP a prévu plusieurs indicateurs pour mesurer l’efficacité de ces évolutions. Le principal sera le taux de recours à EDEF, observé avant et après l’ajout des nouvelles fonctionnalités. L’enjeu est de vérifier si la possibilité de conditionner les dotations incite réellement les financeurs à s’impliquer davantage.

Par ailleurs, les données liées au CPF restent disponibles en open data, garantissant une transparence sur l’utilisation du dispositif, les parcours suivis et l’évolution des pratiques.

La question de l’orientation des choix de formation

Certains observateurs craignent que les entreprises, en devenant cofinanceurs, orientent excessivement les choix des salariés. Sur ce point, Cécile Bertrand nuance : la co-construction peut venir des deux côtés.

L’entreprise peut proposer des formations liées à son évolution stratégique, mais le salarié conserve son droit à initier un projet personnel, notamment pour préparer une mobilité interne ou un changement de métier. Dans tous les cas, l’adhésion du salarié est indispensable : sans son engagement, ni la formation ni la certification ne peuvent être menées à bien.

Perspectives pour 2025 et au-delà

Le CPF reste un dispositif novateur au niveau européen. L’Union européenne recommande d’ailleurs son extension à l’ensemble des États membres. Pour la DGEFP, l’enjeu est de maintenir un modèle à la pointe, en l’adaptant aux besoins du marché du travail et aux attentes des actifs.

Les prochaines priorités identifiées sont :

  • la simplification et la sécurisation des démarches ;
  • l’amélioration de la qualité des formations financées ;
  • l’élargissement de l’offre de services associés, pour mieux accompagner l’orientation, la valorisation des compétences et l’accès à l’information.

En d’autres termes, le CPF ne doit pas seulement être un outil de financement, mais un véritable service intégré d’aide à la formation et à l’évolution professionnelle.

Conclusion

L’entretien avec Cécile Bertrand met en lumière une ambition claire : faire du CPF un dispositif encore plus robuste, sécurisé et adapté aux besoins actuels. Les évolutions récentes, notamment via la plateforme EDEF, traduisent une volonté de renforcer la coopération entre financeurs et bénéficiaires tout en préservant la liberté de choix des actifs.

L’avenir du CPF s’inscrit dans une logique d’équilibre : entre initiative individuelle et co-construction collective, entre financement public et implication des employeurs, entre liberté et responsabilisation. Si les objectifs sont atteints, le CPF pourrait devenir, dans les années à venir, un modèle de référence en Europe pour la formation tout au long de la vie.

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